Rien de mieux, pour illustrer ce 4 juillet qu’une petite vidéo du cimetière de Picpus.
En effet, le jour de l’indépendance des États Unis, l’ambassadeur américain à Paris fleurit la tombe du héros des deux mondes, le marquis de La Fayette, qui y est enterré.
Pourquoi ? Parce que sa sœur, Madame de Montagu est à l’origine de la souscription qui a permis de racheter, en 1803, le terrain. Les contributeurs étaient les familles dont des membres ont été guillotinés en 1794, durant la pire période de la révolution française et dont les corps ont été ensevelis dans ce terrain.
Il s’agit donc essentiellement de famille de la noblesse française, comme les Noailles (la propre épouse de La Fayette était une Noailles), les Montalembert, de la Rochefoucauld, etc., qui ont participé à ce rachat et s’y sont à leur tour fait enterrés.
Le cimetière de Picpus est donc un des deux cimetières privés de Paris.
Les fosses communes du cimetière de Picpus
Ce lieu méconnu demeure émouvant. On peut y voir l’emplacement des fosses communes des 1 306 personnes, de toute origine sociale, qui ont eu la tête décollée, entre le 14 juin et 27 juillet 1794, au nom de la République et de sa loi des suspects, et dont les corps sont unis à jamais dans la terre de notre arrondissement.
Le 13 juin 1794, la guillotine, utilisée pour occire les ennemis de la Révolution, avait été déplacée de la place de la Révolution (aujourd’hui place de la concorde et avant place Louis XV) à l’emplacement de l’actuelle place de la Nation (anciennement place du Trône et ironiquement rebaptisé, à l’époque des faits, « place du trône renversé ».
L’Administration de l’époque avait décidé d’inhumer les corps à proximité du lieu d’exécution. Et il y avait un couvent au 35-37-39 de la rue de Picpus, celui des chanoinesses de Saint-Augustin, qui avait pu être réquisitionné. Le jardin de ce couvent fut donc utilisé pour creuser deux fosses communes.
Le tombereau ensanglanté des suppliciés était déchargé par une brèche qui avait été dégagée dans le mur nord et dont on peut encore voir le linteau de la porte charretière.
Dans l’ancienne chapelle du jardin, les agents publics de l’époque s’occupait de l’inventaire des derniers effets des victimes (les bijoux et autres biens de valeur avaient déjà été confisqués lors de la dernière toilette, à la Conciergerie.
Écoutons Madame de Montaigu :
On y creusa un trou de trente pieds carrés, et chaque jour, après l’heure des exécutions, on entassait pêle-mêle au fond de ce trou, les suppliciés de la journée. Point de cercueil, point de linceul, pas une marque qui pût un jour permettre aux familles de reconnaître leur mort et leur procurer une autre sépulture
Anne-Paule de Noailles, Marquise de Montagu, Paris, Dentu, 1863, 3e édition, p.339-340
Le 27 juillet 1794 correspond à la date de l’arrestation de Robespierre. Le maître d’œuvre principal de cette politique totalitaire. Il n’est pas utile de faire plus ample commentaires.
Le cimetière de Picpus, un lieu de mémoire
Cet havre de Paix est aujourd’hui encore la propriété de « la Fondation de l’Oratoire et du cimetière de Picpus ». Elle est géré par une communauté religieuse qui prie pour les victimes et les bourreaux du totalitarisme.
Je vous y conseille la promenade. Le site se trouve au 35, rue de Picpus et il est visitable l’après-midi, pour 2 euros.
Il est préférable de le faire durant la belle saison pour y profiter du parc (qui est un espace de méditation ou de prière).
L’oratoire comporte de grandes plaques de marbre sur lesquelles sont gravés les noms des personnes ensevelis, identifié grâce aux minutes de leur passage devant le tribunal révolutionnaire (on ne peut pas parler de procès). Ces plaques mentionnent aussi les professions de ces condamnés. Cela permet de se rendre compte que la loi inique des suspects ne concernait pas, comme trop de personnes le croit encore, que les nobles. Toute la population pouvait être touché par la politique absolutiste qui régnait depuis 1793.
Pour finir, voici un diaporama du site, datant de 2009, dont certaines images sont déjà dans la vidéo.
Le parc menant au cimetière de Picpus Fosse commune n°1 du cimetière de Picpus (5/07/2009) Linteau de la porte par où pénétraient les tombereaux sanglants de la guillotine de la barrière du trône Borne de la fosse commune datant de 1794 Entrée de la chapelle des dames chanoinesses de Saint-Augustin, dont l’administration du meurtre de masse avait fait son bureau pour inventorier les effets des condamnés Plaques sur le mur des fosses communes du cimetière de Picpus (5/07/2009) Plaques sur le mur des fosses communes du cimetière de Picpus (5/07/2009) Vue des fosses communes du cimetière de Picpus (5/07/2009) Tombe du marquis de La Fayette au cimetière de Picpus, le 5 juillet 2009
2 Commentaires
Bonjour
Qui gère le cimetière sur le plan financier ?
Auteur
Le cimetière de Picpus appartient à la Fondation de l’Oratoire et du cimetière de Picpus (n°439 709 726).
Elle est successeur de la Société de Picpus qui acheté le terrain où reposaient les corps des guillotinés de la place du Trône (l’actuelle place de la Nation) et surtout composé des familles des plus célèbres suppliciés.
La liste des victime est encore aujourd’hui impressionnante.
MS