Voici une réflexion à chaud sur l'élection de Laurent Wauquiez, à la tête de mon parti, Les Républicains
Les résultats sont sans appel. Avec 74,64 % et, par suite, une élection au premier tour la légitimité de Laurent Wauquiez au sein des adhérents est incontestable.
Le débat au sein de notre famille a été très peu relayé par les médias, si ce n’est pour le caricaturer. Il est résumé au mot « droitisation » comme si cela était une insulte.
Cette tentative de diabolisation est plus que galvaudée. Elle rappelle cette technique, très manichéenne, inaugurée le 29 janvier 1891 par Georges Clémenceau, lors de son discours où il prononça, pour défendre la censure, son célèbre « La Révolution est un bloc« , et s’appropria le camp du bien.
Ce terrorisme intellectuel de la Gauche n’est vraiment plus crédible.
L’autre attaque récurrente, le prolongement de la précédente, était sur sa personne. Personnellement, je ne crois pas aux hommes providentiels et, 2008, je me garde de croire que nos dirigeants maintiennent une ligne constante dans leur parcours.
Toutefois, dans ses discours, il a toujours fait preuve de modération. Surtout la fonction fait l’homme. Et le vote se fait sur une ligne politique à un moment T.
Évidemment, cette ligne provoque encore des divisions en notre sein. Et Laurent Wauquiez n’ignore évidemment pas que sa première tâche consiste à rassembler et redonner une voix cohérente à notre parti.
Pour ce faire, il faut se rappeler que notre famille a eu le courage de faire un diagnostic lucide (là aussi trop peu relayé) sur les défaites amères de mai et juin dernier (Voir « les idées de la droite pour se relancer« , le Figaro, Emmanuel Galiero, le 6 novembre 2017).
Le premier constat est que nous n’étions plus regardés comme un parti populaire. C’est-à-dire un mouvement politique qui sache à la fois parler aux habitants des campagnes, aux habitants de la « France périphérique » et aux citadins ; aux retraités comme aux jeunes diplômés ultra-connectés qui se sentent déclassés comme aux plus modestes, dont d’autres jeunes qui, faute de diplôme, de formation reconnue, ou d’étude au sein de quartiers de banlieue déconsidérés, se retrouvent à alterner les longues périodes d’inactivités ou les emplois ultra-précaires ou dans leur propre auto-entreprise tout aussi précaire.
D’ailleurs, dans son baromètre sur la Confiance de 2017, le Cevipof, estimait que 88% de Français jugeaient que « les hommes politiques ne tiennent aucun compte de ce que pensent les gens comme eux. »
Et le parti de Monsieur Macron est aussi regardé comme celui qui, sous couvert de modernité, ne parle qu’aux gagnants de la Mondialisation.
Il est donc évident que pour offrir une alternative crédible aux choix politiques qui ne correspondent pas à nos principes (tout en reconnaissant que certaines décisions sont à saluer – je ne prends qu’un exemple : le travail du ministre de l’éducation nationale), que notre parti devra refaire de la Politique, c’est-à-dire réfléchir et proposer un projet national alternative à la vision libérale libertaire en cours.
Voici quelques trois de ces sujets majeurs :
Premièrement, l’Union européenne. Aucune mesure du gouvernement actuel n’est concrète – la question des travailleurs détachés a même montré clairement un enfumage. En réalité, il est clair qu’Emmanuel Macron a un discours aux fins fédéralistes. Et avec cette vision le fonctionnement actuel de l’Europe lui est satisfaisant alors que la crise démocratique est énorme. Seul une réforme profonde de ses institutions et de cesser d’être naïf sur la conception allemande du système monétaire, pourra y répondre et notre famille peut, sans remettre en cause cette Union, être à l’initiative de ce débat.
L’Union européenne ne peut être légitime que si ses compétences sont limitées, démocratiques et qu’elle privilégie l’Europe construite avec les peuples et en les associant.
Deuxièmement, la place de la France dans le monde et dans « l’archipel de la gouvernance mondiale » pour reprendre la formule d’Alain Dejammet. Cela implique d’affirmer son identité mise à mal par un mondialisme déraciné (qui englobe aussi le sujet du communautarisme qui va à l’encontre de la construction française au fil des siècles mais aussi les rapports avec les sociétés multinationales). Ce sujet concerne aussi l’immigration. Le danger civilisationnel que représente l’Islam radical ne peut être oublié, comme si la victoire contre l’Etat islamique aurait résolu la question. Enfin, le rôle diplomatique de la France dans les équilibres du monde ne peut consister sur un alignement au monde anglo-saxon ni à quelques états de la péninsule arabique, nonobstant nos relations commerciales.
Troisièmement, le poids de l’Etat. Certes le gouvernement actuel affiche quelques ajustements et cherche les mesures salutaires, notamment en réduisant les charges, pour libérer les énergies et l’inventivité françaises, il ne s’attaque pas réellement au poids tentaculaire de l’Administration, dans toutes ses composantes et sa propension à tout normer.
Il y en a d’autres bien sûr. L’important est que Laurent Wauquiez sache dégager cette vision non comme un futur candidat à la présidentielle mais pour offrir une voix collective au nombreux Français qui ne se retrouve pas dans la politique de Macron et un redressement de notre famille politique.
Et s’il y a des départs. Cela peut être regrettables mais il ne faut y voir un échec ni une forme de sectarisme. Cela est légitime et sain.
Pourquoi affirmer qu’il faut travailler avec Emmanuel Macron tout en disant qu’il y aurait un espace entre En Marche et Les Républicains, sans le définir autrement que par des mots valises comme « humanistes, européens, libéraux et réformistes » ?
Autant rejoindre directement ce nouveau parti politique. C’est le sens de nos institutions. Les Français attendent des positionnements clairs des politiques. Ils respectent ce qui se mettent en danger pour leurs convictions et non ceux qui, pour préserver leur carrière élective.
Et il sera toujours possible de se retrouver aux élections locales, pour des alliances gagnantes gagnantes.